Commissions délibératives : réflexions sur le processus de vote

La fin d’une Commission délibérative est marquée par un vote des parlementaires et des citoyens sur les recommandations qui ont été produites. Au fil des expériences bruxelloises et wallonnes des Commissions délibératives, cette procédure de vote continue de faire débat.

→ Lire Commissions délibératives : tout savoir sur ce modèle de participation réunissant élus et citoyens

Vote secret des citoyens, vote public des parlementaires 

L’intention des fondateurs bruxellois des Commissions délibératives était de permettre un vote identique et public des parlementaires et des citoyens. Cependant certains constitutionnalistes craignaient de faire voter des citoyens de la même manière que des élus dans l’enseinte d’une assemblée. Ils ont donc imaginé une procédure pour redonner du pouvoir au vote des citoyens tout en ne les faisant pas voter comme les élus :

  1. Les citoyens votent à bulletin secret ;
  2. Le résultat du vote des citoyens est annoncé ;
  3. Les parlementaires votent de façon publique en connaissance du résultat du vote des citoyens ;
  4. Les députés doivent se justifier si la majorité des votes des parlementaires diverge de ceux des citoyens. 

Avec cette procédure, même si les parlementaires ont en quelque sorte le dernier mot, ils reçoivent de la part des citoyens une saine pression qui vise à orienter leur vote.

Faire voter élus et citoyens de la même manière

Depuis, la frilosité des constitutionnalistes semble avoir évolué, et il est sérieusement envisagé à Bruxelles de faire voter élus et citoyens de la même manière, de façon publique. Cela ne poserait pas problème d’accorder le même vote aux citoyens, le dispositif étant de toute façon consultatif. 

La première Commission délibérative wallonne éclaire le débat 

La première Commission délibérative wallonne, qui avait pour sujet la participation citoyenne, a eu l’occasion de débattre de cette problématique du vote. Ses réflexions sont pour le moins intéressantes. Les arguments échangés par les participants nuancent l’aspiration bruxelloise à un vote public pour les élus comme pour les citoyens. Une part importante des participants citoyens a en effet exprimé ses réserves quant au fait que leur vote soit public

Contrairement aux élus qui doivent rendre des comptes, les citoyens ne sont pas a priori des personnalités publiques. Sur des sujets sensibles, disaient certains participants, il serait délicat de demander à des citoyens tirés au sort de se prononcer publiquement, sans craindre de pressions extérieures ou d’impacts sur leur vie privée. S’ils étaient plutôt favorables à une égalité du vote entre députés et citoyens, cette difficulté du vote public pour les non élus les a conduit à renoncer à cette proposition.

Une troisième voie possible : faire voter citoyens et élus à bulletin secret 

Pour atteindre l’égalité du vote entre citoyens et élus sans exposer les citoyens, Dreamocracy propose une troisième voie : faire voter élus et citoyens de la même manière mais à bulletin secret. C’est ce qui avait été pratiqué par la Convention constitutionnelle irlandaise. 

Le vote secret a en plus un autre avantage pour les parlementaires : il permet de réduire la pression de la discipline de parti qui pourrait entraver la liberté de leur vote. Au sein des Commissions délibératives bruxelloises, cette discipline partisane a en effet été particulièrement visible lors des phases de vote : “la co-construction disparaît puisque les députés votent selon la ligne du parti” rapporte ainsi un agent public chargé du dispositif.

Le vote à bulletin secret en fin de processus pratiqué par la Convention Constitutionnelle irlandaise peut être un élément de réponse. Si la délibération a changé l’opinion des élus sur un sujet et qu’elle diverge de la position défendue par leur parti, les députés peuvent ainsi plus librement voter suivant leur conviction propre.


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