L’expérience bruxelloise des Commissions délibératives a pu susciter certaines critiques quant à l’équilibre des échanges entre élus et citoyens. Dans un article du Deliberative democracy digest les universitaires Sophia Simon et Julien Vrydagh, se demandent par exemple si la facilité des élus pour la parole publique ne leur donnerait pas un poids disproportionné dans la formulation des recommandations. Quels enseignements tirer de la première Commission délibérative wallonne, facilitée par Dreamocracy, achevée en février 2024 ?
→ Tout savoir sur la première Commission délibérative au Parlement de Wallonie
De l’enthousiasme dès le début du processus
Dès la première séance le 12 novembre 2023, citoyens et élus ont manifesté un réel enthousiasme et engagement dans le processus :
Une enquête qui confirme l’impression de départ
Si les avis semblent positifs en début de processus, qu’en est-il après 5 séances de délibération ? Les universitaires Christoph Niessen et Min Reuchamps ont effectué une enquête auprès des participants sur la base d’un questionnaire soumis en amont et aval des délibérations.
À l’issue des 5 séances, environ 80% des citoyens et des élus participants ont un avis positif sur le processus auquel ils ont pris part. Les 20% restants ne sont pas négatifs pour autant avec 10% se disant “ni positif ni négatif” et 10% de non répondant.
Cette enquête montre aussi qu’une majorité de participants ont un avis positif spécifiquement sur la délibération entre élus et citoyens. “Beau travail entre les députés et les citoyens non élus !” partage un citoyen.
Pour la députée Hélène Ryckmans, cette Commission délibérative a permis “une ouverture de la part des politiques sur la richesse de l’échange direct avec les citoyens”. En témoigne l’avis de son collègue Charles Gardier : “Je dois être honnête, j’arrivais à cette Commission avec un certain nombre de présupposés, allez, peut-être même certains a priori. Ils ont été largement battus en brèche. Je pense vraiment que cet exercice de plusieurs dimanches était très enrichissant, et a amené […] une vraie prise de conscience, une vraie évolution dans ma perception”.
Comment équilibrer les échanges entre élus et citoyens ? Enseignements de la Commission délibérative wallonne
- Des temps de préparation sans élus. Parfois, appliquer le même déroulé pour les élus et les citoyens risque simplement de donner l’avantage aux élus, potentiellement plus informés et à l’aise sur le sujet. Il peut être intéressant de ménager des temps de préparation uniquement entre citoyens, pour qu’ils puissent ensuite entrer dans la délibération avec les élus mieux outillés et donc plus sur un pied d’égalité.
- Des facilitateurs expérimentés : pour pouvoir rééquilibrer la parole entre les plus bavards et les plus timides les Commissions délibératives demandent, plus que d’autres initiatives de participation, une facilitation expérimentée. En effet, équilibrer les interventions avec des élus, experts de la parole publique nécessite une animation active et suffisamment assurée pour maintenir le cadre.
- Un accompagnement personnalisé entre les séances : une personne de l’équipe Dreamocracy était spécifiquement chargée d’appeler les participants entre chaque séance et de passer le temps nécessaire avec eux pour les préparer, et répondre à leurs questions. Il s’agissait d’un vrai temps d’accompagnement qui a permis aux citoyens d’arriver plus confiants et à l’aise dans la délibération avec les élus.
- Des temps de retours et de préparation avec les élus : l’exercice de délibération directe avec les citoyens était nouveau pour les élus. Des temps de réunion en visio ont été mis en place entre les séances avec les députés. Ils ont permis de recevoir leurs retours, déminé certains points en amont des séances et ont permis de renforcer la qualité des échanges entre élus et citoyens.